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Nous publions régulièrement des articles dans différents magazines. Voici quelques extraits choisis. 1) Rubrique "bonsaïs" Le bonsaï est-il une merveille inaccessible? La taille de structure ou l'élaboration de la charpente Travaux d'hiver : création d'une forme "en forêt" Le "tokoname" ou l'art de la mise en scène.
2) Rubrique "Jardins Japonais
1) Rubrique "bonsaïs" : Le Bonsaï est-il une merveille inaccessible? Il y a de ceci une trentaine d'années, le bonsaï n'était encore sous nos latitudes qu'une curiosité asiatique à laquelle s'intéressaient quelques excentriques ou quelques jardiniers très curieux. Les principes régissant la création et l'entretien d'un bonsaï étaient ignorés du plus grand nombre et de splendides bonsaïs japonais en ont, hélas, fait les frais. Fort heureusement, l'art et la science du bonsaï se sont peu à peu répandus en Europe et on a découvert avec étonnement que ces plantes apparemment si mystérieuses répondaient à ces quatre règles : naturel, simplicité, asymétrie et concentration sur l'essentiel (les principes mêmes du zen). L'entretien d'un bonsaï, qui peut paraître compliqué pour un néophyte, est en fait très simple si on considère qu'il se calque sur les grandes lois de la nature. Pour commencer, il faut savoir qu'il existe des bonsaïs d'extérieur et d'intérieur. La distinction est d'ordre climatique: les premiers demandent, pour s'épanouir librement, le cycle des saisons auquel ils sont habitués: printemps, été, automne, hiver. Ce n'est d'ailleurs pas parce qu'un bonsaï est petit qu'il faut le croire exagérément fragile: un bonsaï chêne, érable ou pin résistera aussi bien que ses aînés aux rigueurs de l'hiver (si ce n'est en cas de très fortes gelées, par exemple –15° où il est conseillé de protéger la motte et le pot). La seconde catégorie, les bonsaïs d'intérieur, comprend les essences d'arbres issus des régions tropicales, subtropicales et méditerranéennes de notre planète. Ces variétés n'ont donc pas besoin d'un tel repos hivernal et peuvent donc passer toute l'année à l'intérieur. Certaines espèces apprécieront néanmoins de passer l'hiver dans la pièce la moins chauffée de la maison. D'autres, celles qui sont tout à fait tropicales, pourront être cultivées à des températures ne descendant jamais en dessous des 20°. Afin de savoir lesquelles sont le mieux adaptées à votre intérieur, il vaut mieux toujours s'adresser à un spécialiste. De même, pour que votre bonsaï prospère, d'autres conseils sont primordiaux. Ainsi, il ne faut pas oublier qu'il est avant tout un arbre qui, dans son milieu naturel oriente toujours sa cime vers le moindre bout de ciel et donc de lumière. Or, il va vivre dans une maison, sous un toit et il faut donc lui réserver un emplacement qui soit au maximum à un mètre de votre fenêtre la plus claire. Quant à l'arrosage, la devise la plus appropriée est : "l'excès nuit en toute chose". Ni terre gorgée d'eau, ni terre désespérément désertique, mais un bon équilibre entre l'humide et le sec est la règle qui vaut d'ailleurs pour toutes les plantes, bonsaïs ou non, que nous cultivons en pot. En ce qui concerne le prix des bonsaïs, nous n'en sommes heureusement plus aux prix exorbitants pratiqués aux débuts du bonsaï en Europe et il existe maintenant des bonsaïs dans le commerce pour tous les budgets. La seule chose sur laquelle il ne faut jamais lésiner, ce sont les conseils que seul un spécialiste pourra vous fournir en quantité, et en qualité, ainsi qu'un suivi sérieux après l'achat. En conclusion, comprendre et imiter la nature, c'est ce qu'on appelle "avoir la main verte", et par extension pourrait-on dire "la main bonsaï". De plus, la compréhension de la vie d'un arbre est porteuse d'une certaine sagesse et de bien des enrichissements. L'école de la nature est en fin de compte une merveilleuse école de vie. La taille de structure ou l'élaboration de la charpente Par le seul effet d’une taille judicieuse effectuée au bon moment, un bonsaï peut être transfiguré. Et tailler judicieusement signifie surtout : épurer. Dégager les lignes directrices de l’arbre, faire une sélection sans pitié entre le bon grain et l’ivraie. La période de repos des arbres est une bonne saison pour effectuer une taille approfondie, encore dénommée « taille sculptée ». D’une part, en ce qui concerne les variétés à feuilles caduques, le moment est on ne peut mieux choisi pour scruter convenablement l’ossature des branches. D’autre part, la circulation de la sève étant quasi à l’arrêt, la perte de celle-ci au travers des blessures occasionnées par les coupes sera réduite au minimum. C’est particulièrement vrai pour les conifères qui ont parfois tendance à « pleurer » pendant plusieurs jours lorsqu’on les taille pendant la belle saison. Une troisième raison est que les bourgeons printaniers consécutifs à une taille effectuée longtemps avant le réveil de la sève, se positionnent généralement mieux. Comme si l’arbre, prévenu à l’avance, organisait alors mieux sa transformation... Avec l’expérience, on acquiert une vision qui anticipe de mieux en mieux les évolutions causées par telle ou telle façon de tailler. Il existe néanmoins de grands principes directeurs qui permettent de prendre des décisions de taille (lesquelles sont souvent "douloureuses" pour un tailleur débutant). Ces principes sont vrais dans la grosse majorité des situations rencontrées : * il faut enlever les branches qui contournent le tronc, * il faut enlever les branches qui vont à l’encontre du sens principal de la ramification (et qui croisent alors d’autres branches), * il faut enlever les branches qui ont une forme en « u », * il faut éviter que deux branches soient exactement à la même hauteur de part et d’autre du tronc. Il est important de prévoir pour chaque branche un espace de développement futur suffisant. Pour ne pas s’y perdre, j’utilise souvent l’analogie de la main ouverte. Elle est un bon modèle, non seulement pour le tronc par rapport à ses branches principales, mais aussi pour chaque branche principale par rapport à chacune de ses ramifications secondaires. Appliquer ce modèle permet de mieux s’y retrouver. Le reste est question de style (de nombreux ouvrages existent à ce sujet) et, même si cela peut paraître prétentieux, osons le dire : de talent. Les dons peuvent bien entendu être affinés, mais un minimum d’intuition artistique est néanmoins une condition sine qua non pour se lancer dans l’aventure du bonsaï. Bien sûr, il existe un ensemble de techniques et de règles, mais celles-ci n’en sont que le solfège. Or, la place laissée à l’interprétation est vaste, et c’est heureux car elle est la clé d’un univers qu’on n’a jamais fini de découvrir. Et dans lequel on n’a jamais fini d’apprendre. N’oubliez jamais de faire pivoter l’arbre afin de l’observer sous tous ses angles possibles. Un bonsaï réussi doit être beau à voir sous tous ses angles, chaque position doit offrir des perspectives intéressantes. Avant de la condamner à disparaître, il est plus prudent de laisser sa chance à une branche qui est bien située au moins dans une des perspectives offertes à la vue. Il faut également garder à l’esprit que les feuillus et les conifères ne sont pas égaux devant la croissance : un conifère mettra plusieurs années à remplacer une branche coupée par mégarde (ou ne la remplacera pas du tout), alors que la plupart des feuillus produiront plusieurs branchettes en remplacement d’une seule éliminée. Une faute de taille sur un feuillu est donc beaucoup plus facile à réparer. Sur un conifère, cela ne pardonne pas. En ce qui concerne la façon précise de sectionner une branche, je vous conseille : * d’utiliser une pince à section concave grâce à laquelle on obtient la cicatrisation la plus rapide et la plus esthétique (toute cicatrice grandit en même temps que se développe le bonsaï : une vilaine trace ne peut que devenir de plus en plus visible avec le temps) ; * d’appliquer à l’endroit de chaque coupe un peu de mastic cicatrisant « spécial bonsaï » ; * de ne jamais couper à angle droit par rapport à l’axe de la branche : la cicatrisation en est très ralentie, * mais au contraire, de tailler en diagonale, la section orientée vers le haut : c’est là que la cicatrisation sera la plus rapide, et la plus discrète ; * et, bien entendu, de réfléchir plutôt deux fois qu’une avant d’ôter une branche. Si vous sentez la confusion vous gagner, mieux vaut abandonner là votre travail et y revenir à un autre moment, vous y aurez gagné en recul. Lorsqu’on a terminé la taille de structure, le regard doit pouvoir traverser la ramification sans encombre ou presque, chaque petit rameau se détachant nettement de ses voisins, et le tout dégageant une impression de perspective et de profondeur. On est proche du bonsaï, on le regarde de tout près et on a pourtant l’impression de l’admirer dans le lointain, se découpant harmonieusement sur un fond de ciel pur, arbre puissant et pourtant rempli de grâce. Après une saison particulièrement éprouvante pour tous les arbres (température excessivement basse en juillet puis excessivement haute en août, ceci combiné à la sécheresse), il convient de profiter de la période de début d’automne pour apporter aux bonsaïs les soins qui leur permettront de passer convenablement le cap toujours un peu délicat de l’hiver Bonsaïs d’extérieur. Pour les bonsaïs d’extérieur, il est extrêmement bénéfique de faire un dernier apport d’engrais avant l’hiver, en tout cas tant que l’arbre n’a pas encore amorcé son véritable repos hivernal. Cette ultime fertilisation avant l’hiver permet aux bonsaïs d’extérieur de consolider les branches nouvellement formées, ce qui aura pour effet de les rendre plus résistantes aux gels hivernaux. Pour cette raison, préférez un engrais liquide car son assimilation est plus rapide, tandis que son action est de moins longue durée qu’un engrais solide. Il n’est par contre pas opportun de faire en cette période des tailles de bois trop sévères. Cela pourrait en effet provoquer une poussée de sève, et une formation tardive de jeunes branches qui seront dès lors beaucoup trop fragiles pour passer l’hiver avec succès. Pour certains feuillus particulièrement délicats, il peut même être bon, au contraire, de laisser se former des « jets » excessivement longs (et esthétiquement non conformes) dans le seul but de faire s’épaissir les branches principales et de les rendre ainsi plus solides. Il sera toujours temps d’effectuer des tailles de formation lorsque l’arbre sera totalement au repos, et la sève totalement redescendue à son niveau le plus bas. Si vous désirez faire encore un dernier ligaturage avant l’hiver, pensez à ne pas trop serrer les fils car ce serait néfaste en cas de gel. Enfin, n’oubliez pas de réduire les arrosages, car même si certaines journées sont encore très douces, songez que les arbres règlent leur rythme biologique sur la température des nuits. Or, celles-ci n’ont plus rien à voir avec les belles nuits d’été : le mercure du thermomètre descend à présent nettement plus bas. En ce qui concerne le rempotage des bonsaïs d’extérieur, celui-ci peut être effectué dès que toutes les feuilles des feuillus sont tombées, et à condition de pouvoir offrir une protection suffisante pendant les périodes de gel. Si, par manque de place ou d’équipement, cette protection ne pouvait être apportée, il est alors préférable d’attendre le mois de mars pour effectuer le rempotage. Une petite anticipation pour les distraits : le rempotage doit se faire, au printemps, avant la repousse des feuilles (idéalement, au moment du débourrage). Pour les conifères qui sont toujours plus lents, le rempotage est possible un peu plus tard dans la saison. Bonsaïs d’intérieur. Pour les bonsaïs « d’intérieur », deux cas de figures se présentent : il y a ceux qui ont passé l’été dehors, et ceux qui ne sont pas sortis de la maison. Pour les bonsaïs d’intérieur qui ont pris l’air, il faut tenir compte du fait que, plus on les laisse tard à l’extérieur, plus leur réaction sera forte lorsque vous voudrez les « réacclimater » à une vie à l’intérieur. Insensiblement, les bonsaïs « d’intérieur » se sont adaptés aux nuits déjà automnales et ont probablement entamé une mise au repos : leur croissance s’est fortement ralentie, sinon arrêtée. L’idéal est, en fait, de les rentrer avant que les chauffages n’aient été rallumé dans la maison. Et de les mettre d’abord dans la pièce la plus fraîche, et la plus lumineuse (ils ont pris l’habitude d’une lumière bien plus généreuse). Après une quinzaine de jours, et un certain nombre de feuilles jaunes (c’est le prix de leur adaptation), vous pouvez alors les placer dans une pièce un peu plus chaude. Un conseil : taillez-les alors, les nouvelles pousses provoquées par la hausse de température ne s’en positionneront que mieux. Vous pouvez à ce moment aussi recommencer à les engraisser, mais à une fréquence plus basse qu’en été, bien sûr (toutes les six semaines, par exemple). Les conditions peu hospitalières de nos maisons en hiver - je pense à l’air généralement trop sec et à la lumière trop pauvre - font qu’il vaut toujours mieux rempoter les bonsaïs d’intérieur au tout début du printemps. Sauf bien sûr en cas d’urgence : par exemple pour des arbres dont la motte a tellement grossi qu’il serait dangereux de les conserver dans le même pot, et dans la même terre, plusieurs mois de plus. S’il vous est impossible de faire passer vos bonsaïs d’intérieur par un « sas de température » lorsque vous les rentrez, vous aurez probablement une très grosse chute de feuilles, caractéristique : le jaunissement est très rapide et les feuilles tombent dès qu’on effleure la plante. C’est très spectaculaire, et très alarmant, mais c’est immédiatement suivi d’un bourgeonnement intense visant à remplacer les anciennes feuilles par un feuillage plus adapté aux nouvelles conditions. Lorsque se produit cette chute spectaculaire, il faut être particulièrement attentif car c’est aussi le moment que choisissent les parasites minuscules cachés sous les feuilles pour se réveiller. N’oubliez donc jamais de vérifier s’il s’agit bien d’un renouvellement saisonnier ou si c’est une attaque virulente de parasites. Les microscopiques araignées rouges par exemple peuvent sommeiller à l’extérieur pendant la fin de l’été, mais elles n’attendent qu’une hausse de température adéquate pour rentrer tout aussitôt en activité. Si vous regardez votre bonsaï devant une lumière vive, vous pourrez alors apercevoir tout un réseau de très fines toiles d’araignées. Pour les bonsaïs d’intérieur qui ne sont pas sortis de la maison en hiver, le choc du changement des conditions sera moins violent. Mais ces bonsaïs ne s’étant pas refait une véritable santé dans des conditions naturelles, ils seront malgré tout plus faibles face aux désagrément du chauffage et de la baisse de la luminosité. C’est lorsque vous rallumerez les chauffages que vous verrez de façon évidente si votre bonsaï a gagné en santé pendant l’été ou s’est au contraire affaibli, parce que l’emplacement choisi n’était pas le bon ou que l’entretien était par trop approximatif. Un bonsaï d’intérieur affaibli a tendance, à l’allumage des chauffages, à produire des feuilles dont les bouts se mettent à noircir immédiatement. C’est là le signe infaillible que les racines sont endommagées. A l’apparition de ces symptômes, un séjour de quelques semaines en serre pourra lui faire le plus grand bien si vous voulez éviter que des branches entières ne finissent par mourir. Entre autres conseils, il est bien entendu peu recommandé de placer le bonsaï juste au dessus d’une source de chauffage directe, ou de trop l’éloigner de la fenêtre. Ces deux conditions peuvent paraître difficiles à réaliser ensemble car les radiateurs sont malheureusement souvent placés sous les fenêtres. C’est néanmoins très important, et il vaut, à la rigueur, mieux placer le bonsaï dans une pièce beaucoup plus froide (la majorité des arbres d’intérieur supportent des températures pouvant descendre jusqu’à huit, et même cinq degrés pour certains d’entre eux). Travaux d’hiver : création d’une forme « en forêt ». A l’époque où la nature se dénude de ses oripeaux flamboyants, le regard de l’amateur de bonsaï ne peut manquer de s’attarder sur les ossatures dévoilées des « seigneurs de la forêt ». L’occasion est trop belle pour la manquer : c’est en cette saison que le mystère des structures se révèle. L’observation a toujours été un excellent terreau pour la créativité, surtout si le matériau travaillé est, comme dans le cas du bonsaï, un matériau naturel. Contrairement à un avis répandu, il est possible, même en plein hiver, de réaliser des travaux dans le domaine du bonsaï. Il faudra évidemment prendre garde de ne pas réveiller les arbres d’extérieur qui sont en plein repos : si vous les rentrez dans une pièce chauffée, surtout ne les y laissez que le temps de la réalisation (maximum 5 à 6 heures) ! En effet, un laps de temps plus long pourrait suffire à provoquer une remontée de la sève. En plein mois de décembre, cela est nettement prématuré. Je vous propose de vous pencher sur la réalisation, ce mois-ci, d’une de mes formes préférées : la forme « en forêt » ou « yose - ue » en japonais. Dans la nature, on peut observer de nombreux styles de forêts différents : forêts de résineux très denses, forêts majestueuses et bruissantes de feuillus, forêts côtières battues par les vents ou encore perchées sur des sites escarpés... Toutes peuvent être recréées par l’amateur. Et c’est d’ailleurs pour un débutant un type de travail relativement gratifiant car il requiert un niveau technique abordable et fait la part belle à la créativité et au talent de « l’arrangeur ». Le choix des sujets doit retenir toute votre attention. Vous devez vous munir d’arbres de grandeurs et d’âges différents. Spécialement si vous voulez éviter de produire un paysage à l’aspect de « pépinières ». Les troncs doivent donc avoir des diamètres bien différents. Les sujets seront en nombre impair (pour une impression de naturel plus grande) : à partir de 5 pour un petit groupe, de 19 à 21 pour des groupes plus massifs. A la rigueur, la quantité des sujets ne dépendra que de la place dont vous disposerez pour exposer votre forêt. COMMENT CHOISIR LES ÉLÉMENTS DE LA FORET ? Le modèle suivant est un des plus classique. On choisit l’arbre le plus développé pour symboliser « le père ». C’est autour de lui que va s’organiser la plantation. On choisit ensuite un deuxième arbre qui représentera « la mère ». Ce sera donc le deuxième en importance. Les autres sujets sont sélectionnés pour être de taille décroissante, aussi bien en hauteur qu‘en épaisseur de tronc. Pour la hauteur, il est toujours possible de raccourcir en taillant, bien entendu. On placera les arbres les plus jeunes vers l’arrière de la forêt afin de créer une impression de « lointain », de perspective. LE CHOIX DE LA POTERIE Dans le cas d’une forêt, plus la poterie est discrète, meilleure est l’illusion d’optique. On choisit donc des pots extrêmement plats. Quitte à faire un compromis pour la première année de formation : on peut commencer avec un pot moyennement haut pour ménager les racines et rempoter ensuite successivement dans des poteries de plus en plus plates. Pour la couleur, on choisit des tons comme le brun, le beige, toujours non vernis pour les conifères, ; éventuellement colorés pour les feuillus. La profondeur d’une poterie définitive pour une forêt est généralement de 1 à 2 cm. LA PRÉPARATION Toutes les extrémités des branches doivent être raccourcies d’un tiers (à ce stade, ne taillez pas encore la tête des arbres : attendez de les avoir mis en place définitivement) tout en donnant une forme triangulaire, comme pour un sujet solitaire. A cette différence près que la ligne principale sera, ici, la ligne verticale. Chaque arbre de la forêt n’a en effet pour se développer latéralement qu’un espace très restreint. Dans la nature aussi, des arbres plantés très près les uns des autres auront une croissance beaucoup plus longitudinale. INSTALLATION DANS LA POTERIE On place les petites grilles sur les trous d’évacuation et on les fixe à l’aide de fils métalliques (c’est important car on sera amené à essayer les arbres selon différents arrangements avant de trouver le meilleur). On épand quelques millimètres de terreau et on passe ensuite à la préparation des racines. On dégage la base du tronc jusqu’au premières racines apparentes, on démêle le chevelu et on enlève environ un tiers des radicules (en partant des extrémités) pour provoquer une ramification étalée plutôt qu’en profondeur. Il est à noter que plus on conserve de branches, plus le volume de racines conservé doit être important : la taille des racines sera proportionnelle à la taille des branches. LA PLANTATION On plante en premier lieu l’arbre le plus fort (le père) aux 2/3 de la longueur du plateau et aux 2/3 vers l’avant. Les arbres secondaires se plantent autour et vers l’arrière en respectant une implantation triangulaire : ce premier groupe est composé des 2/3 des arbres utilisés. Le deuxième groupe est composé de l’arbre-mère, qui sera aligné sur l’arbre dominant mais sera 1/3 plus bas, avec des sujets plus minces tout autour, et s’inscrira dans un second triangle. Quelques petits sujets seront plantés entre les deux groupes principaux, mais en retrait, vers l’arrière. Tous les troncs, lorsqu’on regarde la forêt de face, doivent être visibles : aucun ne doit en cacher un autre. Il faut également éviter d’obtenir des alignements. On place la terre autour des racines en veillant à ce qu’elle comble bien tous les vides. On doit obtenir un beau sol, plus élevé au centre du plateau. FINITION La taille de finition a pour but d’accentuer la forme triangulaire du groupe dans son ensemble. On enlève toutes les branches basses en respectant la règle : 1/3 de tronc, 2/3 de ramure. On peut à présent tailler toutes les têtes des arbres : le contour de la forêt tout entière doit former un grand triangle. Pour la finition du sol, il vaut mieux récolter de la mousse courte comme celle qui pousse sur les toits ou sur les pierres (ses racines sont plus courtes). Un tiers de surface garni de mousse suffit à obtenir un bon effet décoratif. SAUVEGARDE Une forêt nouvellement créée doit être placée à l’abri de tous les excès de soleil, de vent, et a fortiori de température : attention, donc aux gelées hivernales ! Le "tokoname" ou l'art de la mise en scène Au Japon, il n’est de bonsaï que d’extérieur. Le bonsaï d’intérieur est, là-bas, un concept totalement dépourvu de sens. On considère qu’un arbre est fait pour vivre dehors, qu’il soit grand ou petit. La conception même des habitations traditionnelles reflète cette idée. Les parois sont souvent grandes et coulissantes afin que la frontière entre le dedans et le dehors puisse se faire oublier. C’est l’espace intérieur qui va vers le jardin, et non l’inverse. Le bonsaï d’intérieur est un concept qui a été inventé par les européens, et principalement les européens du nord, accoutumés à garnir leur intérieur de plantes vertes tropicales, la plupart issues des sous-bois des forêts chaudes du globe. Des plantes qui supportent par conséquent une faible luminosité combinée à une température relativement élevée (ce qui est le cas en hiver, dans nos maisons et appartements). Or, les variétés utilisées pour obtenir des bonsaï s’accommodent rarement de ce genre de régime. Ce serait plutôt une forte luminosité, combinée à une température basse, qui leur conviendrait à la perfection. Cette discordance est la source principale des affaiblissements et des maladies qui accablent souvent les bonsaï perpétuellement cloîtrés. Mais ceci est une parenthèse, et j’en viens maintenant au sujet de cet article : comment exposer un bonsaï pour qu’il atteigne le faîte de sa beauté, selon des critères japonais de mise en scène... Il existe un nom pour cet art délicat : le tokoname. Si les Japonais conservent soigneusement à leurs bonsaï leur environnement naturel, il existe des occasions au cours desquelles l’un d’entre eux est choisi et mis à l’honneur pendant un ou deux jours maximum, dans la maison, dans un cadre spécialement aménagé pour lui. Le cadre réservé au tokoname est généralement une petite estrade le long d’un mur qui forme un léger retrait, face à l’endroit où l’on mange et où l’on se tient après le repas. Trois ou quatre éléments composent le décor, autour du bonsaï. Une corrélation intime, et fertile en émotions esthétiques, est recherchée. Le premier élément est le socle sur lequel va se trouver le bonsaï. Sa teinte, sa forme et sa couleur doivent s’harmoniser parfaitement avec la robe du bonsaï, et doit comme pour une poterie, rehausser sa beauté sans l’écraser. Même si les plus belles tables à bonsaï sont en bois de rose (malheureusement très coûteux), on trouve également de très jolis modèles dans d’autres essences. Le second élément est une « plante d’accompagnement ». Il ne s’agit pas d’un second bonsaï, même si elle est souvent plantée dans une coupe à bonsaï. C’est habituellement une graminée, une mousse, un sédum, ou toute autre plante basse, sinon rampante, éventuellement fleurie. Sa couleur et sa forme sont là pour offrir un contrepoids agréable au regard, un contraste. Elle est aussi une petite portion de cet environnement naturel qui compose de si beaux tableaux sans l’intervention de l’homme. Le bonsaï est par nature doté d’une structure plus ou moins détectable, mais d’une structure quand même. La petite herbe sauvageonne ou la mousse apporte par contre une note de fantaisie naturelle profitable à tous les éléments du tableau. Le troisième élément est une estampe. Elle sera accrochée sur le mur servant de fond au tokoname, en prenant garde de ne pas créer une symétrie trop grande par sa position par rapport au bonsaï. Son thème parlera souvent de la saison dans laquelle on se trouve et ses couleurs viendront parfaire l’harmonie générale. Un texte (phrase ou poème) s’y trouvera parfois et offrira alors un sujet supplémentaire de rêverie ou de réflexion. Car un tokoname réussi, non seulement est parfaitement beau, mais il permet au spectateur de voyager en lui-même car il lui ouvre des perspectives esthétiques nouvelles, des voies de réflexion et la découverte à tous les coups d’une facette inattendue de la nature. 2) Rubrique "jardins japonais" Les jardins secs ou "jardins à contempler". Nous savions déjà qu'un idéal de pureté obtenu par une discipline austère est un trait caractéristique de la pensée japonaise. Avec les jardins "zen", qui ne sont plus constitués que de pierre et de sable, on retrouve ce désir de passer outre l'aspect superficiel des choses. Le jardinier ambitionne d'atteindre à l'essence même des éléments constitutifs du monde. Ce n'est plus le plaisir immédiat né d'une simple admiration qui est recherché, mais une interpellation sur quelque chose de plus profond. Volontairement dépouillés des choses jugées non essentielles, la plupart des jardins secs ne comportent ni élément aquatique, ni plante, ni arbre. Seuls des arrangements de pierre composent la scène et tout l'art consiste à jouer sur les différences de forme, de couleur, de taille pour créer les effets graphiques voulus. Plusieurs conceptions existent au sein même de l'art des jardins secs. La première - la plus accessible - consiste en la représentation symbolique d'éléments bien naturels. Ainsi, la profondeur spatiale, le mouvement et le bruit, parviennent même à être évoqués par des arrangements de pierre. Un ruisseau sera suggéré par des petites pierres ovales emboîtées les unes dans les autres comme les écailles d'un poisson ; la mer par une aire de gravier ratissée de dessins en forme de vagues. Les gros rochers ont généralement pour fonction de symboliser des îles, des poissons (ou d'autres animaux),ou encore des cascades. Poussée à l'extrême, cette façon de "peindre avec des pierres et du sable" conduit à représenter la mer et une montagne par une aire et un promontoire de sable. Des codes culturels anciens parlent aussi au travers du nombre de pierres qui composent un ensemble : un groupe de trois pierres, par exemple, symbolise la triade chinoise classique du ciel, de la terre et de l'homme. L'abstraction est, d'une certaine façon, figurative, d'autant plus qu'elle est souvent associée à un jardin du type "promenade". Les deux jardins se renforçant alors mutuellement par la puissance de leur contraste. Passant d'un langage à l'autre, le visiteur ne se lasse pas et se repose l’œil dans le paysage simplifié du jardin sec. La seconde conception est peut-être un peu plus difficile à appréhender pour un occidental. Un regard sur la peinture traditionnelle en Orient permet de mieux comprendre l'esthétique qui régit ce type de jardin. D'une part, pour un peintre japonais, les espaces vides sont aussi (si pas plus) importants que les espaces peints. D'autre part, pour un peintre zen, la nature n'est en somme qu'une vaste iconographie religieuse. Pour un moine zen, en effet, Bouddha, la nature et l'homme, ne forment qu'une seule unité. Et la peinture comme l'aménagement d'un jardin sont à prendre comme un exercice de méditation. L'exemple le plus célèbre de ce genre de jardin est celui du RYOAN -JI( "temple du dragon paisible" )situé au nord-ouest de Kyoto. Il ne comporte aucun autre élément que des pierres disposées de façon asymétriques. Il est à noter que ici, comme souvent pour les jardins secs, l'ensemble est entouré d'un muret et qu'on retrouve une fois de plus l'expression de l'union de l'angle droit avec la forme naturelle, trait récurrent dans l'art japonais. Ce type de jardin n'essaie pas de symboliser à tout prix des éléments reconnaissables du monde naturel. Il est conçu pour être contemplé d'un point bien précis, et surtout pas pour être parcouru. De plus, pour le contempler, le visiteur est invité à s'asseoir, et il faut savoir qu'en japonais l'idéogramme "être assis " a également le sens de "méditer". La disposition des pierres dans ces jardins a donc clairement pour fonction d'inciter à la méditation. Laquelle est une expérience difficilement transmissible à un non-initié. Il paraîtrait que lorsque la disposition des pierres est parfaite, leurs contours se dissolvent peu à peu pour l'homme en méditation. En tout cas, une chose est certaine, c'est qu'il est difficile d'être insensible à l'impression de calme et de sérénité qui se dégage de ces jardins secs purement abstraits, qu'on soit à même de méditer ou pas. Quel que soit le niveau auquel on se place, il me semble que la grande leçon à tirer de l'étude des jardins secs zen porte sur l'art d'utiliser des espaces vides comme éléments pleinement constitutifs du paysage, ainsi que des matières extrêmement sobres. Dénué de tout artifice, l'équilibre ainsi obtenu est d'autant plus durable qu'il est basé sur des principes simples. Tirant leur origine du shintoïsme primitif qui vouait un culte aux pierres, sensées abriter des esprits divins, les jardins secs ont traversé les âges et continuent de parler aux générations actuelles : les aires et les montagnes de sable sont encore et toujours des motifs prédominants du jardin japonais moderne. Et en tout cas, l'engouement qu'ils continuent de susciter à travers le monde prouve bien qu'en s'attachant à l'essentiel, ils ont atteint quelque chose d'universel. Un écrin pour la cérémonie du thé. Un jardin de thé est dessiné, nettoyé et même arrosé dans le but unique de former un accord parfait avec le déroulement de la cérémonie dont il porte le nom. Ce type de jardin est un parcours, un cheminement dont la destination ultime ne peut être que la cabane de thé. C'est d'ailleurs, avant même les jardins - promenades, le premier genre de jardin dans l'histoire japonaise à tenir compte dans sa composition d'une dynamique du déplacement. Son essence est donc d'être là pour être traversé et fournir au visiteur un sas, un passage au cours duquel il est invité à oublier le monde extérieur et ses artifices, et à purifier son esprit afin de mieux goûter au thé de la cérémonie. Le jardin est divisé en une zone extérieure et une zone intérieure. Au plus profond de cette dernière se niche la maison de thé. Puisque le but est d'amener l'invité à un dépouillement de l'esprit, la sobriété est de mise : composé de plantes modestes à feuillage persistant, petit, tout en couleurs atténuées et accueillant très peu d'objet ornementaux, le jardin abritera tout au plus un érable ou un cerisier comme seule note de couleur. Totalement à l'opposé des jardins de pierres et de sable, le jardin de thé est un jardin on ne peut plus humide, et par conséquent souvent colonisé par les mousses. Cette humidité n'est d'ailleurs pas un hasard, mais au contraire découle du rituel de la cérémonie. Son atmosphère est très particulière et pour tenter de la comprendre, je laisse ici la parole à un spécialiste du Japon : "La cérémonie commence à la minute même où l'invité entre dans le jardin, qui est pour la plupart du temps, arrangé pour évoquer l'atmosphère d'une étrange vallée perdue et offrir au visiteur un ensemble de merveilles visuelles pendant qu'il le traverse." En effet, si les moyens sont obligatoirement simples et rustiques, les effets obtenus doivent évoquer une beauté quasi surnaturelle : on rejoint l'idée d'une retraite hors du monde normal et connu de tous les jours. Les bougies ou les lampes à huile sont les seuls éclairages utilisés dans un jardin de thé la nuit : leur lumière vacillante associée aux pierres de passage et aux arbustes fraîchement aspergés d'eau, créent ainsi des miroitements environnés d'un mystère enchanteur. Les premiers concepteurs de ces jardins sont responsables d'une autre innovation dans l'art des jardins au Japon : celle de détourner des objets de leur usage premiers afin de les utiliser dans des buts exclusivement esthétiques. Ainsi en est-il des lanternes de pierre à l'origine réservée aux sanctuaires et aux cimetières. Outre une ou des lanternes, un autre élément que contient toujours un jardin de thé est une vasque de pierre alimentée régulièrement en eau pure et accompagnée d'une puisette en bois de cryptomère. Une des phase du rituel du thé est en effet une purification préliminaire qui consiste à se laver les mains et à se rincer la bouche avec l'eau de cette vasque. Le jardin de thé est donc une espèce de parcours iniatique pendant lequel l'accent est mis sur la beauté d'un quotidien modeste et rustique, sans artifices spectaculaires et qui pourtant, par une mise en scène habile, et minutée, procure des impressions exceptionnelles. Le jardin de thé est aussi un "jardin de l'instant" où l'intervention de l'être humain suit toute une série d'étapes étalées sur une période d'environ quatre heures (ce que dure en moyenne une cérémonie de thé habituelle). Pour mieux saisir l'esprit du jardin, il importe de connaître un tant soit peu le déroulement de ce pour quoi il a été conçu. La première règle est une propreté extrême. La préparation de la cérémonie commence donc par un nettoyage de la pièce et ensuite du jardin. A la fin de cette opération, les arbres et les pierres sont lavés, et le jardin aspergé d'eau. Les pierres de passage doivent être d'une propreté telle qu'une personne puisse s'y déplacer pieds nus sans se salir. Pour créer une impression très particulière de fraîcheur, le jardin est aspergé à trois reprises : cela s'appelle "les trois rosées". La première aspersion est "l'eau de salutation", elle a lieu de façon à ce qu'un tiers des surfaces ait séché lorsque les invités arrivent. Ceux-ci s'installent alors dans un abri contigu à la cabane et attendent que l'hôte signale qu'il a terminé les préparatifs en venant les saluer. La seconde aspersion a lieu pendant le repas. Alors que ses convives continuent de se restaurer, l'hôte sort, arrose à nouveau et renouvelle l'eau de la vasque rituelle. La cérémonie de thé suit le repas, elle donne lieu en général à la dégustation de plusieurs types de thés différents. Lorsque le thé est bu, l'hôte procède à la troisième aspersion au cours de laquelle il humidifie les jardins intérieur et extérieur et l'espace situé devant la porte principale. Cette dernière opération a pour but d'offrir aux invités lors de leur traversée de départ dans le jardin, les effets visuels les plus propices à les émerveiller et à faire de ce jour un moment unique et privilégié. Une remarque quant aux pierres de passage : elles ont ceci de particulier dans un jardin de thé qu'à l'approche du pavillon, elles sont placées plus profond et en rangs plus serrés afin d'obliger le visiteur à marcher lentement pour se détendre et se préparer au rituel. Comme on le voit, un jardin de thé n'est pas un jardin comme les autres. Beau par lui-même bien que d'une beauté humble, il est avant tout un faire-valoir pour un événement qui requière à chaque fois un caractère d'exception.
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